Le dimanche 20 mars 2022, un parent d’élève nous adresse un mail. Il nous propose une collecte en faveur des enfants ukrainiens réfugiés en Pologne. L’idée : « 1 Doudou, 1 poche de bonbons » afin de leur apporter un peu de douceur et de chaleur humaine dans cette épreuve.
Le départ est prévu le samedi 26 mars : nous n’avons que 5 jours pour mobiliser nos élèves, leurs familles et l’ensemble des personnels de Saint-Paul. L’ampleur de la mobilisation dépasse nos attentes, un vrai élan de solidarité a permis de récolter plusieurs centaines de lots.
Retour sur cette opération et interview de M. SYOËN pour en connaître davantage sur ses motivations et sur cette expédition.
Une collecte inédite réalisée en un temps record
Le lundi 21 mars un courrier est donc envoyé à toutes les familles et, au sein de l’établissement, le « Groupe Solidarité » mène une campagne d’affichage. De même, la communication se fait sur nos réseaux sociaux. Résultat : dès le mardi doudous, peluches et bonbons arrivent au Bureau de la Pastorale.
Les dons augmentent jour après jour de façon exponentielle. Il faut se mettre à plusieurs pour les trier, confectionner des lots « Doudou + Bonbons » correspondant aux différents âges des enfants. Ensuite, le tout est rangé dans des cartons afin de faciliter le transport et la distribution. Il est important de souligner que tout le monde a joué le jeu : les doudous sont magnifiques (beaucoup sont neufs) et les bonbons ont l’air très bons. Le vendredi 25 mars, grâce à la générosité de chacun, le camion est chargé : mission accomplie !
Un long périple vers l’Europe de l’Est
Le samedi 26 mars M. SYOËN prend la route au volant d’un 14m3 accompagné d’un autre chauffeur. Ils partent distribuer, dans différents lieux, du matériel médical civil et militaire, des denrées alimentaires et produits pour bébés, sans oublier nos doudous et bonbons. Retour sur cette expédition hors du commun.
Interview de M. SYOËN
SP : Qu’est-ce qui a déclenché votre projet de prendre la route pour rejoindre la frontière ukrainienne ?
AS : L’invasion de l’Ukraine par la Russie, les images des femmes et des enfants plongés dans cette guerre. Face à ces images de presse j’ai ressenti une volonté d’action. Ayant moi-même des enfants, je ne pouvais pas ne pas agir. Ceci d’autant plus qu’il me semblait que certaines organisations tardaient à opérer.
SP : Comment avez-vous pu nouer des contacts pour recenser les besoins et apporter les dons ?
AS : Tout s’est fait par des relations de personne à personne et le réseau associatif. L’Association « France-Ukraine » pour le matériel médical mais aussi le lien avec un médecin, puis un orphelinat. Grâce à de nombreuses rencontres, de fil en aiguille, le projet a pris forme.
SP : Qu’avez-vous pu récolter finalement ? Où avez-vous pu déposer ces dons ?
AS : Trois palettes d’équipement médical, notamment pour soigner les blessures infligées par les bombardements. Tout cela a été livré à la base logistique de Przemysl. Nous avons d’ailleurs dû faire face à un aléa : pour entrer en zone neutre, il fallait la carte grise d’origine. Le camion étant en location, nous n’avions qu’une photocopie… Nous avons réussi à trouver un camion vide en Pologne et ainsi déposer notre chargement.
Grâce à l’association « Petits Pas DELO » (basée à Mussidan en Gironde) nous avons pu apporter dans un orphelinat des denrées alimentaires pour bébés, du lait, des couches…
Les « Doudous & Bonbons » ont été distribués à différentes structures :
– Une partie a été donnée à l’école 95 de Cracovie et au centre de transit Médyka. N’ayant pas d’accréditation, c’est l’adjoint au maire qui a assuré cette livraison.
– D’autres « Doudous & Bonbons » (une petite partie) est partie pour un orphelinat de Ivano-Frankivsk en Ukraine. C’est le directeur de l’orphelinat qui est venu les chercher en zone neutre.
– Le reste, soit les 2/3 des « Doudous & Bonbons » sont partis pour Lviv grâce au maire.
C’était important et beau de voir les enfants sourire et adhérer à ce cadeau. Apporter un peu de douceur et de tendresse au milieu du tumulte de la guerre est essentiel.
SP : Combien de chauffeur ont fait la route ? Combien de kilomètres et combien de temps de trajet ?
AS : Nous sommes partis à deux chauffeurs. Nous avons fait 4 888 kilomètres en deux jours et demi. Nous comptions dormir dans notre camion la nuit du lundi au mardi mais cela n’a pas été possible donc nous avons réservé une chambre d’hôtel.
SP : Pouvez-vous nous parler de l’accueil que vous avez reçu ? Quelles ont été les réactions ?
AS : A la base logistique nous avons reçu un très bon accueil. Certes, ce que nous avons fait est une goutte d’eau mais les bénévoles nous ont dit : « Heureusement que vous êtes venus ». En fait, chaque action répond à un besoin. Avec le « Convoi de l’Espoir » (- initiative française – convoi parti vers la ville de Medyka en Pologne), les bénévoles nous ont aussi très bien accueillis.
SP : Que retirez-vous de cette expérience humaine ? Etait-ce la première fois que vous vous engagiez ainsi ?
AS : Oui c’était la première fois. C’est une force qui m’a poussé à le faire.
Ce que je retiens :
– Une profonde détresse des réfugiés que j’ai croisés mais aussi leur dignité et le profond respect des consignes qui leur étaient données.
– Une très grande solidarité qui se met en marche « à vitesse grand V » à tous les niveaux.
Si l’on prend par exemple le camp de réfugiés de Cracovie, en partant de rien tout a été monté en quelques jours. Tous ont une réelle volonté d’aider les Ukrainiens.
– Ce n’est pas facile de voir la détresse de ces personnes qui font face à la guerre, d’être confronté à leurs souffrances malgré la dignité dont ils font preuve.
– Je retiens aussi le silence du camp de Medyka “égayé” parfois par quelques notes de piano ; mais surtout l’organisation et le respect des règles malgré l’attente qui parfois peut être longue (plusieurs heures).
Crédits photos : M. A SYOËN (Pologne) / ME & OF (Saaint-Paul)
Bravo pour cette action qui nous a permis, à notre tour, de faire acte de solidarité même à distance et à modeste échelle. Merci pour ce compte rendu et ces images qui rendent concret votre engagement.